L’Allemagne et moi!
J’ai passé mon baccalauréat lettres modernes en juin 1978. Mon rêve était d’entrer en faculté de lettre. Le hic c’est qu’il n’y avait pas de faculté de lettres modernes ici à Casablanca.
Mon père était contre l’idée de m’envoyer à Rabat et moi non plus je ne voulais pas vraiment quitter le bercail. Bon grés mal gré je me suis inscrite en faculté de droit.
L’année où je suis entrée en Fac de droit, cette dernière fut déménagée à route El Jadida, aux fins fonds de Casablanca. Pour y aller, c’était la croix et la bannière, en bus le 43 et le 46. Souvent, la RATC* faisait grève et nous laissait dans ce no man’s land. Pour rentrer à la maison, il fallait faire du stop. J’avais une peur bleue de me retrouver le soir dans ce nouveau quartier désert, qui n’abritait que la Fac. Je rentrais en pleur à la maison, soit le bus était bondé et je devais rester debout sur un pied, ou bien pas de bus et le retour était une sorte d’aventure risquée.
En fin de compte mes parents furent convaincus de me laisser aller étudier à l’étranger à cause de tous ces inconvénients. Bien entendu j’ai choisi l’Allemagne, car j’y ai passé mes vacances d’été en 1978 en 1979. De plus mon grand frère y a fait ses études aussi et ce pays m’attirait comme un aimant.
J’atterris en Allemagne dans la ville de Hanovre en 1980, j’habite chez des amis à mon frère et je commence à apprendre l’allemand dans une école privée. Ce fut 5 mois de pur bonheur, j’ai appris la langue allemande au bout de 4 mois grâce à une prof française, qui maîtrisait parfaitement la grammaire allemande et aussi grâce à mon immersion dans une famille allemande.
Hanovre est la ville où l’on parle le meilleur allemand le ‘hoch Deutsch’. Cela m’a facilité la tâche et j’ai exercé la langue avec bcp de facilité. Mon entourage était fier de mes progrès rapides.
Après l’apprentissage de l’allemand j’ai du passé un examen d’entrée à l’université allemande. Je me suis donc inscrite à l’université Johanes Gutenberg de Mayence et plus exactement à la faculté de linguistique appliquée à Germersheim, pour obtenir un diplôme supérieur en traduction. Germersheim est un petit village en Rhénanie au bord du Rhin, peu connu, célèbre par ses mannes de moustiques agressifs.
j’ai passé quatre ans de bonheur dans ce village, peu attrayant, peu connu et difficilement accessible. J’ai connu des étudiants de tous les pays du monde et je me suis liée d’amitié à plusieurs. J’ai aussi été invitée dans leurs foyers respectifs où j’étais très bien reçue par leurs familles.
J’ai côtoyé des Allemands de toutes les classes et de tous les niveaux socioculturels. Les vacances de fin d’année je les passais chez la famille de mon amie Birgit. Qui m’avait invitée à venir tous les ans et à toutes les occasions. J’ai découvert l’hospitalité allemande, leur sens de l’éthique et du respect, leur amour de la musique classique et leur veillée autour du poêle dans leur maison au bord du lac le Tegernsee, un paysage magnifique au pied des Alpes.
Avec eux j’ai appris à faire du ski de fond, des randonnées en Montagne. Ils n’aiment pas la sédentarisation et sont continuellement en mouvement, ils travaillent, ils bricolent à la maison ou font de la marche dans les forêts et les parcs. C’est en Allemagne que j’ai découvert l’importance de l’environnement et sa protection, c’est là bas que j’ai appris à aimer la nature et les promenades au bord des lacs, des rivières, dans les bois et dans les parcs de la ville.
J’ai terminé mes études en 1986 et j’ai quitté l’Allemagne vers la fin de l’été. l’Allemagne fait partie intégrante de ma vie, j’y retourne tous les ans pour y passer des vacances et revoir mes amis. Une des qualités rares des Allemands est la loyauté, même s’ils sont, créatifs, intelligents et bosseurs. Ils gardent un côté naïf, car une fois qu’ils accordent leur confiance c’est pour la vie.
l’Allemagne n’est pas un pays austère comme veulent le croire certains, ce n’est pas un pays lugubre. C’est un pays magnifique qui a réussi à créer une économie solide et à assoir une éthique et une discipline sociale, qu’on ne trouve nulle part ailleurs. Le sud de l’Allemagne, la Bavière est un endroit sublime, d’une beauté à couper le souffle. Le Nord aussi a son charme, mais différent à cause des vents et de l’influence de la mer du Nord. L’Allemagne a un débouché sur la mer du Nord et sur la mer Baltique, ce n’est pas un pays côtier, d’où le caractère distant et réservé de sa population. On y parle plusieurs dialectes selon les régions.
Au nord on parle le Plattdeutsch et au sud en Bavière on parle le Bavarois, mais tous les dialectes ont leurs origines dans la langue germanique, moi je parlais le Hoch Deutsch, mais je comprenais un peu certains dialectes. À l’école tous les Allemands apprennent et écrivent l’allemand classique.
Mon expérience avec l’Allemagne était des plus constructives, surtout que j’ai travaillé à la Lufthansa à mon retour au Maroc et j’ai aussi connu leur rigueur et leur professionnalisme, en milieu de travail.
J’ai un faible pour l’Allemagne que je considère aussi, comme un chez moi, j’adore la langue allemande, la langue de Goethe le grand poète et écrivain et je regrette d’avoir de moins en moins l’occasion de la parler.
*RATC : Régie autonome de transport de Casablanca de l’époque