Casablanca et Casablancais !
Le 19 Janvier 2021
Notre grande ville, la métropole économique la locomotive du Maroc, souffre toujours, de bcp de maux. C’est une ville grande et hétéroclite. Elle a pris du retard dans son développement. Elle a grandi en béton et en bâtiments hors cachet architectural
Casablanca de mon enfance était ordonnée et obéissait à un schéma directeur défini. Ses quartiers constitués de jolies villas Art Deco, sont systématiquement transformés en zones immeuble.
Les Casablancais perdent irrémédiablement leurs repaires, tout est transformé en zone d’habitations massives. Que font ils alors? Soit ils décident de démolir leur maison et construire à sa place un immeuble, sans aucun cachet, ou vendent leur terrain à des spéculateurs et des promoteurs immobiliers, qui transforment le moindre coin de ces espaces, en zone d’habitation. Les arbres sont abattus, la verdure disparaît et des édifices de cinq, six ou sept étages émergent. Ils sont affreux et ne respectent aucune ligne architecturale définie. Ils sont collés les uns aux autres, pour ne rien perdre du terrain. Tout ce qui était vert devient gris, maussade. Tout le calme qui régnait devient vacarme infernal. Les maisons qui abritaient cinq à sept personnes deviennent des bâtiments de cent personnes et plus.
La pollution se multiplie, le bruit devient une fatalité . La circulation intense, les véhicules se multiplient. C’est normal dirait-on, la ville doit évoluer et la demande est forte et la croissance démographique est importante. Certes, mais où est l’ordre, l’organisation urbanistique et l’harmonie architecturale? L’aspect originel de la ville est sacrifié en faveur de la spéculation immobilière vorace.
photo:@papillon943
Je prends l’exemple du quartier 2 mars, enfant je me souviens comme tout ce quartier était calme, il faisait bon y vivre. Il était plein d’arbres et de palmiers. Ce quartier a été saccagé par la course effrénée de la spéculation immobilière. Même mon école primaire, une des plus vieilles et prestigieuse de Casablanca a été démolie, pour construire à sa place un complexe immobilier des plus hideux.
Le mot patrimoine est vide de sens dans notre ville, car la parole est à l’argent et l’enrichissement, par le béton. Casablanca dispose d’une agence urbaine qui attribue les autorisations de construction, mais à voir ce qui se construit ici, je ne sais sur quels critères, elle se base pour les accorder?
Casablanca à non seulement souffert et souffre toujours de la spéculation immobilière, elle a aussi connu le pire de ses tragédies, dans les années quatre-vingt, lors de la grande sécheresse, qui a frappé le pays. Toute la compagne de l’époque s’est rabattue sur la ville, toutes les périphéries ont été prises d’assaut par tous ceux qui fuyaient la sécheresse et qui viennent chercher du travail en ville. Les bidonvilles commencent à pousser comme des champignons, des quartiers voient le jour, bâtis de manière précaire et aléatoire sur des terrains agricoles.
Le phénomène deux étages plus magasins aux Rez de chaussée apparaissent, dans ce décor apocalyptique, la médiocrité s’installe.
Casablanca connaît un exode rural sans précédent, que les autorités de l’époque n’ont pas su gérer. On a laissé faire.
Aujourd’hui Casablanca ressemble à n’importe quelle métropole anarchique et chaotique.
Certes l’état a encouragé l’habitat social et plusieurs résidences, répondant à ces critères ont vu le jour. Il y a eu aussi une bataille féroce lancée contre l’habitat anarchique. L’état a délogé des centaines de milliers de familles des bidonvilles et leur a garanti un habitat digne, dans d’autres quartiers, sauf que même à ce niveau, l’appétit des gens a été stimulé. Plusieurs familles ont profité, sans vergogne de la situation, en se créant des besoins extravagants. La gabegie chez les uns et la cupidité chez les autres ont rendu la tâche difficile.
La compagne contre l’habitat insalubre a été menée férocement. Or l’exode continue et dès que les autorités ont le dos tourné, d’autres bidonvilles voient le jour. C’est un cercle infernal et un travail ininterrompu, qu’il faut mener quotidiennement et sans relâche.
Cela dit le changement positif est saboté, par les citoyens eux-mêmes, ils résistent au changement et à l’évolution. Ils veulent vivre en zone urbaine, tout en gardant les habitudes paysannes. La précarité et la situation sociale catastrophique rendent extrêmement ardue l’évolution vers un espace urbain digne de ce nom.
De plus, le statu quo est maître à bord, personne ne veut ni ne tolère le changement. Une résistance à tous les niveaux, on critique le travail des délégataires, mais on ne fait rien pour changer les mauvaises habitudes. En commençant par éviter de jeter des détritus dans les bouches d’égout de la ville, en mettant ses ordures ménagères dans un sac fermé et posé à l’intérieure du bac et non pas à côté, ou en gardant ses sacs-poubelle à l’intérieur et attendre le passage des éboueurs, pour les sortir. C’était comme ça que ça se passait dans mon enfance. Aujourd’hui, j’ai même vu de gens jeter leur sac de poubelle par la fenêtre, nous ne cessons de reculer, car nous manquons d’éthique et de sens de responsabilité, nous habitons en ville tout en cohabitant avec la compagne. Même la compagne doit obéir à des règles du vivre ensemble aussi.
Le quartier Maarif, qui est devenu le centre névralgique de Casablanca est une aire chaotique, une circulation intense a lieu dans ses ruelles, une démolition quasi permanente des petits immeubles art déco et la construction d’immeuble avec plus de capacité d’habitation. C’est à dire avec plus de résidents, plus de voitures, plus de détritus et plus de problèmes d’assainissement. La vitesse à laquelle l’habitat se multiplie dépasse la cadence de l’assainissement et de l’aménagement des voiries. Les trottoirs au Marrif sont encombrés de marchandises. L’espace public est rétréci, car les boutiques se permettent d’étaler leurs marchandises sur la voie publique. Il est quasiment impossible de marcher dans se quartier, ailleurs que sur les chaussées, qui elles aussi sont encombrées par des stationnements en deuxième et troisième position. Les ordures ménagères posées devant les entrées des immeubles, leur contenu éparpillé. Bien entendu il ne faut pas oublier les carrioles, les vendeurs ambulants, les mendiants et les gardiens dont pillulent le quartier etc..
L’anarchie tue Casablanca à petit feu, la densité habitable, la circulation tumultueuse, la pollution, les travaux publics mal réalisés ( les câbles qui sortent des poteaux, les nids de poule, les carreaux cassés et crasseux, les tiges d’acier pointant du sol) . Casablanca a besoin de plusieurs services d’inspection des travaux publics, avec pour rôle ultime de veiller à la bonne réalisation des travaux et au respect total des cahiers de charge.
Les espaces verts sont rares, mis à part ceux crées par la ville. Les promoteurs immobiliers ne respectent pas l’environnement et construisent des bâtiments, sans prévoir de petits espaces verts entre les immeubles. Casablanca est bétonnée, fermée et désordonnée.
La politique urbaine de la ville doit changer et c’est urgent. Les mentalités doivent évoluer volontairement sinon à coup de pénalités. L’octroi des autorisations de construction doit être mieux géré. La verdure, le respect de l’environnement doivent être exigés de tout promoteur immobilier de la ville et faire partie des clauses techniques des cahiers de charge de la ville.
Les Casablancais doivent revoir leur façon de faire et s’ils ne veulent pas, il faudrait aussi prévoir des pénalités à leur encontre. Afin qu’ils intègrent l’éthique et le comportement citoyen dans leur quotidien. On vit dans une grande ville et nous devons faire en sorte de la tirer vers le haut et ne pas la briser et la maintenir dans une sorte de moyen âge
Nous sommes tous responsables, car nous sommes tous des intervenants !