Addaralbida, une vaste cité pleine de contrastes et de contradictions, une des villes les plus récentes du Maroc, mais aussi une métropole mal organisée, parfois chaotique, anarchique. Une ville qui se cherche toujours, importante par son apport économique crucial pour le pays. Elle est à la fois le problème et la solution. Le problème à cause de sa dimension étendue son accroissement qui se consolide aux fils des ans, sans respect d’un schéma directeur bien défini, par ses graves malaises sociaux, par le chaos de sa circulation intense et par ses contrastes. Elle est le point de départ de toute l’activité économique du pays et le premier marché qui fournit toutes les autres villes du royaume.
Les bidonvilles
Casablanca une ville otage de ses problèmes structurels. Une ville victime de son évolution démographique rapide, due principalement à un exode rural intense qui a sévi durant les dix années de sécheresse, qu’a connue le Maroc à la fin du siècle dernier. Casablanca est entourée, de zones pastorales. Les habitants de ces zones se trouvent contraints à cause d’un avenir incertain, de venir se réfugier dans la cité à la recherche de travail et de survie. Cet exode est à l’origine de la prolifération de bidonvilles, dans toutes les périphéries de la communauté urbaine. Ils se sont ajoutés à d’autres agglomérations insalubres traditionnelles. Le laisser-aller des autorités durant cette période et souvent leur complicité a rendu le problème inextricable. Une extension anarchique du tissu urbain de la Ville, qui a généré un déficit flagrant dans l’aménagement et l’approvisionnement en eau, électricité, assainissement, école, dispensaires. L’exception est devenue une règle. Les migrants du monde rural s’établissent à Casablanca dans des conditions précaires et construisent baraque sur baraque, sous l’œil complaisant des responsables, de l’époque.
Ces quartiers périphériques sauvages constituent un handicap majeur à l’essor économique et social de la cité. Toute une population grandissante et en continuelle croissance s’est greffée à la population initiale de la ville. Casablanca s’est vue confrontée à un manque flagrant d’infrastructures élémentaires et de structures d’accueil et d’insertion, pour une grande majorité de la population émigrante de la compagne. Un sous-équipement une marginalisation engendrant un mal-être urbain grave. Cette population s’est trouvée obligée d’inventer sa propre chance, en s’adonnant à des commerces ambulants, à créer des zones commerciales insalubres, car il y va de sa survie. Cette situation a eu pour conséquence, la montée des inégalités socio-économiques dans la ville. Pendant longtemps, ces exodes furent regardés comme une sorte de fin en soit. Nulle politique économique ne les a accompagnés, afin de résoudre les problèmes qui en découlent. Cette tranche de la population abandonnée à son sort et les quartiers bidonvillisés qu’elle a créés, est devenues une amère réalité de la ville de Casablanca.
Déclin du centre-ville
Casablanca a non seulement connu la prolifération des quartiers insalubres durant les années de sécheresse, elle a aussi vécu la déchéance et les dégradations de son centre-ville, une débâcle du précieux patrimoine. Le centre de la ville s’est vu, donc déserté de ses affaires florissantes, de toute sa dynamique. Le déclin de ses bâtiments art déco. Certaines avenues sont envahies par des marchands ambulants et par d’autres commerces pas très glorieux. Tous les Casablancais assistent impuissants au délabrement et à la détérioration des richesses architecturales, souvent à leur démolition. L’activité du centre-ville s’est déplacée petit à petit vers d’autres quartiers moins adaptés. L’axe principal de Casablanca s’est trouvé brusquement privé de son rôle de moteur économico-commerciale de la ville. Vidé de sa substance, il est devenu une sorte de hub d’un commerce informel envahissant.
Les repères de l’activité commerciale de la ville se sont évaporés, voir même dilués dans une sorte de désorganisation totale, ce qui a donné naissance aux fils du temps à d’autres quartiers.
Disparition de zones résidentielles.
Un processus de densification et de concentration urbaine accompagne la poussée démographique de la ville de Casablanca. Il a comme toile de fond, une course effrénée vers le gain et l’enrichissement à travers une politique immobilière galopante. Conséquence, des quartiers entiers ont perdu leur identité et leur splendeur. Des villas construites selon l’architecture traditionnelle casablancaise, démolies pour faire place à des immeubles d’une architecture moderne, monotone et triste.
Des maisons qui abritaient jadis cinq à six personnes se sont transformées en bâtiment de plus de 100 individus. Les promoteurs immobiliers qui ont transformé ces quartiers en de véritables usines, s’en sont donnés à cœur joie. Nos beaux quartiers résidentiels paisibles et verts sont devenus, du jour au lendemain, des espaces fermés par des bâtiments de cinq, six, souvent sept étages, où plus aucun arbre ne pousse. Des quartiers bâtards, encombrés, étroits et bruyants.
Des endroits qui étaient dans le temps, calmes et sereins sont devenus, une sorte de champs de bataille d’une circulation chaotique, un espace stérile où les gens habitent les uns sur les autres dans une proximité asphyxiante.
Parmi les quartiers ayant subi cette violation architecturale et cet assaut immobilier intense, il y a le quartier du 2 Mars. Un havre de paix ombragé et calme, victime d’une densité effarante, devenu aujourd’hui un des endroits les plus difficiles à traverser. Il a perdu tout son attrait, toute la verdure et toute la beauté Art déco, ensevelies sous les bulldozers, sous l’acharnement et l’avidité de la promotion immobilière des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix.